21°

Dans ton salon, au milieu de l’hiver, à 21°, tu trouves qu’il fait chaud.

Sous l’eau aujourd’hui j’ai trouvé ça froid, très froid…

D’autant que la remontée en bateau vers le nord de la mer de Cortez fut longue jusqu’à Los Islotes et que j’avais déjà emmagasiné du froid. Pourtant j’avais mis ma combi pour faire office de k-way. Même la cagoule pour protéger mes oreilles du vent.

Je suis déjà enrhumée, faudrait pas en rajouter.

Un peu agitée certes, la traversée nous en a quand même mis plein les yeux. Des paysages arides, lunaires et envoûtants.

Un peu comme la vallée de la mort…

Y’a rien à voir mais c’est beau.

– « Non mais quand même, t’as vu quoi ? »

– « J’ai vu des couleurs. Des sensations. Des impressions »

J’avais un peu la trouille avec cette saloperie de rhume qui ne me lâche pas. La dernière fois que j’ai plongé avec une sinusite, c’était à Bali et j’ai fini avec le sang qui coule du nez, un mal de tête carabiné, un malaise dans l’eau et l’impossibilité de plonger pendant plusieurs jours.

Bizarrement j’avais moyennement envie de recommencer.

Mais comme aujourd’hui c’était la « sortie otaries » et que j’ai fait tout ce voyage pour elles… J’ai pris mes cliques et mes palmes et Zou, sur le bateau avec mes Kleenex planqués dans le masque.

(Vu que les moniteurs ne sont pas très emballés quand tu leur dis que tu mouches…)

Finalement, j’ai quand même avoué rapidement à Thierry que j’avais des petits soucis histoire qu’il me laisse descendre très très très doucement et éventuellement qu’il sache pourquoi je tourne de l’œil en émergeant (ce serait dommage qu’il pense que je fais un accident de décompression après une plongée dans la zone des 10 mètres !)

Donc tu cogites, tu hypocondries, tu flippes et puis tu finis par arriver sur les lieux. Tu vois une otarie… puis deux, trois, douze, cinquante… une colonie !

Elles font un barouf pas possible ! Et à peine l’ancre jetée, elles quittent leurs rochers pour venir s’amuser autour du bateau !

Hier il y avait trop de vent, personne n’est venu les voir alors aujourd’hui elles sont déchaînées !

Oublié le rhume, oublié la fraîcheur de l’eau, oublié la fatigue du voyage… Bloc sur le dos, ceinture de 10kg autour de la taille, bascule arrière et me voilà les filles !

Bougez pas, j’arrive !

Passons rapidement sur le fait que la température de la mer m’est bien revenue en tête dès l’immersion, quand l’eau s’est infiltrée partout en dépit des 3 couches de Néoprène, plastique et autre polaire (oui, la polaire existe dans les vêtements de plongée !!!) Une sharkskin (peau de requin) qui me tient vaguement chaud mais qui surtout me cisaille gaillardement les aisselles…

Passons rapidement aussi sur la douleur au niveau des sinus qui a bien failli me faire remonter…

Et passons enfin sur la beauté des énormes poissons perroquets, le foisonnement des poissons anges, les surprenantes couleurs des étoiles de mer, les murènes et les langoustes parce qu’honnêtement, j’ai un peu honte de l’avouer mais… J’en avais rien à carrer.

En revanche, j’ai failli pleurer de joie à la première otarie qui est venue faire son show !

C’est hallucinant ce que cette grosse bestiole pataude sur terre est gracieuse dans l’eau.

Et joueuse.

Et taquine.

Et un peu gonflée quand même puisqu’elle se permet de t’attaquer gentiment.

Et tout goguenard que tu es, tu feras moins le malin quand tu verras la mâchoire grande ouverte de certaines otaries voulant croquer ma caméra (genre Joey Starr qui foncerait sur des paparazzis mais avec de plus jolies dents) ou tentant de mordre le détendeur d’un collègue de palanquée !

Bref, aujourd’hui j’ai eu super froid dans de l’eau à 21° mais je me suis fait bouffer la cagoule (ne cherchez pas, ce n’est pas une métaphore) par une otarie, j’ai senti ses moustaches sur ma main et ça, ça réchauffe.

PS comme j’ai déjà bien abusé de votre temps messieurs dames, je n’ai pas fait le point sur “la bouffe du jour” mais vous ne perdez rien pour attendre…